Cela faisait un moment que j’attendais que certains des écrits qui ont constitués l’ode au féminisme américain soient (enfin) traduits en français ; avec Gloria Steinem je n’ai pas été déçue loin de là.
Depuis ma licence à Paris 8 et par goût je lis beaucoup d’essais et peut-être l’équivalent de quatre ou cinq romans par an, dans ces lots de lectures rares sont les témoignages. Mais celui-ci est une perle, un bijou d’humanité, de luttes sociales et féministes et d’espoir à propos du genre humain. À chaque lecture je pleure, je ris, je suis émue, etc. Certainement ma meilleure lecture de 2019 !

Si on veut être écouté, il faut écouter. Si on espère que les autres vont changer leur façon de vivre, il faut savoir comment ils vivent. Si on veut être vu, il faut regarder les gens dans les yeux.

Gloria Steinem, Sur la route, page 84


Pour rappel, Gloria Steinem (1934-) est ce que l’on appelle une community organizer itinérante mais aussi journaliste militante, elle est à l’initiative du Women’s Media Center et le magazine féministe Mrs.
Elle a passé sa vie sur les routes américaines à défendre des droits civiques des femmes mais aussi des minorités raciales, sociales, etc.

Ce livre est une autobiographie retraçant les pérégrinations de Gloria Steinem dans les différents États d’Amérique, mais aussi en Inde et en Europe. Truffé de petites histoires de vies, d’anecdotes militantes et de retours entre son enfance et sa vie sur les routes, Gloria écrit avec sincérité, avec beaucoup d’humanisme et sans jugement ni sur les situations auxquelles elle est confrontée, ni sur ses propres sentiments.

Les sondages ont depuis longtemps montré que la majorité soutient presque toutes les questions posées sur la table par le mouvement des femmes, mais on continue de faire croire à celles et ceux qui se retrouvent dans nos valeurs qu’ils sont isolés, décalés ou se fourvoient carrément. Au début, on pensait que les féministes étaient uniquement des ménagères insatisfaites, puis qu’elles constituaient un petit groupe d’excitées révolutionnaires qui brûlaient leur soutien-gorge, puis qu’il s’agissait de parasites vivant aux crochets de l’aide sociale, puis de copies conformes des cadres masculins avec attaché-case, et de carriéristes frustrées qui avaient oublié d’avoir des enfants. Pour finir, elles sont été accusées d’être responsables du fossé croissant entre les sexes qui risquant de faire basculer les résultats des élections. Cette fois, c’en était trop, alors, on nous a expliqué qu’on avait atteint une époque “postféministe” et que nous pouvions nous détendre, lever le pied, tout arrêter. Sauf que l’objectif commun de toutes ces descriptions disparates et contradictoires est précisément de ralentir et d’entraver tout ce qui pourrait remettre en question la hiérarchie actuelle.

Il y a un enseignement à tirer de tout cela. Quand on nous dit que le féminisme est mauvais pour la famille, il faut comprendre qu’il est mauvais pour la famille patriarcale, mais bon pour la famille égalitaire qui forme la base de la démocratie.

Gloria Steinem, Sur la route, page 170

Whitney Young

Qu’est-ce qui l’avait fait changer d’avis ? […] Puis elle avait lu que Whitney Young, un militant des droits civiques, avait avoué avoir eu un mouvement de recul involontaire le jour où il était monter à bord d’un avion en Afrique en découvrant que le pilote était noir. Il avait alors pris conscience de la haine de soi qu’il avait intégrée simplement en grandissant dans une culture raciste.

Gloria Steinem, Sur la route, page 157



UPDATE :

The Glorias, film inspiré par l’ouvrage, disponible sur Amazon Prime le 30/09/2020

Comments

Ça donne super envie ! Merci !
(wah je crois que j’avais pas laissé de commentaire sur un blog depuis au moins 6 ans…)